les a priés avec douceur de pacifier les choses, et leur a proposé une fois de plus des articles de paix très justes et raisonnables pour les faire accepter par Pompée. Mais comme ils savaient sans aucun doute que Pompée voulait tout ou rien, ils ont refusé et se sont excusés auprès de César. Maintenant, Lépide, quand ce noble héros a été nommé souverain, a-t-il donné des signes qu'il avait l'intention de pratiquer la tyrannie ? Pas du tout. Il a rappelé les exilés, reconnu les enfants de ceux qui avaient été proscrits à l'époque de Sylla, qui était un oppresseur, et onze jours plus tard, il s’est volontairement démis de la souveraineté, se contentant du consulat avec Servilius Isauricus. Après cela, Lépide, dirais-tu que César était un tyran et que Pompée était le défenseur de la liberté ? Mais revenons rapidement sur sa vie afin d’avoir plus de temps pour pleurer sa mort. Tu te souviens sans aucun doute de tous les stratagèmes que Pompée a utilisés pour éviter de combattre César et pour prolonger la situation. Ces manœuvres étaient si évidentes et son ambition était si connue que même ses soldats disaient ouvertement qu'il prolongeait la guerre uniquement pour préserver son pouvoir. En réalité, il savait que vainqueur ou vaincu, il devrait abandonner le pouvoir souverain ou lever complètement le masque sous lequel il se cachait pour une partie des Romains. Quant à César, qui avait confiance en l'équité de sa cause et en celle des dieux, il recherchait son ennemi et ne craignait pas de l'attaquer pour le combattre. Rien dans son cœur ne le hantait de culpabilité, car il savait qu'en se vengeant, il se vengerait en tant que Romain, et qu'en se débarrassant de son adversaire, il libérerait Rome d'un tyran. Son espoir envers les dieux lui a été profitable : il a remporté la bataille tandis que Pompée l’a perdue. Cet homme, qui avait été si favorisé par le destin quand il était innocent, a été abandonné dès qu'il est devenu criminel. Il ne savait plus ni combattre ni vaincre, et il ne savait même pas être vaincu en homme courageux. Dès que ses troupes ont eu le dessous lors de la bataille de Pharsale, au lieu de les encourager en combattant à leur côté, Pompée s’est retiré dans sa tente, presque sans savoir ce qu'il se disait. Voyant que les choses se détérioraient encore pour lui, que ses retranchements étaient forcés et que César s'approchait, il s’est exclamé, effrayé : « Comment, même dans notre propre camp ! » Après avoir prononcé ces mots, il s’est enfui une seconde fois, abandonnant tous ceux qui restaient de son parti. Il aurait pourtant été plus honorable pour lui de mourir par les armes de César que par l'épée du traître Septimius, qui avait autrefois servi sous ses ordres. Mais étant donné que cet homme portait dans son cœur la haine, le remords, la honte d'être vaincu et le désir de pouvoir, il n'est pas étonnant que dans l'espoir de régner, il ait finalement perdu la raison. Mais après avoir reconnu que César savait l'art de vaincre, voyons, Lépide, s'il a bien su utiliser la victoire, s'il a été inhumain ou clément, s'il s’est montré juste ou austère, s'il a été tyran ou citoyen romain. Dès que le champ de bataille lui a été acquis et que l'ardeur qu'il avait à combattre s’est adoucie, il a vu autour de lui le grand nombre de soldats morts qui l'entouraient, et il a versé autant de larmes qu'il leur avait fait 107