et défie au combat quiconque veut se mesurer contre lui, soit avec des armes, soit sans armes. Comme personne ne se présente, malgré les invitations réitérées que fait le héraut par l'ordre du roi: je vais, lui dit le prince, vous faire un présent digne de votre valeur; et il lui fait donner un éléphant très-grand et déjà âgé. L'athlète satisfait, emmène l'animal. Le peuple applaudit par de grands cris à l'action du roi, et se venge de la supériorité de l'athlète par des sarcasmes, qu'il lance sur sa vanité et son orgueil. On voit paroître ensuite les députés des Serres. Ils présentent deux robes, l'une teinte en écarlate, l'autre d'une blancheur éblouissante: toutes deux sont issues des fils de ces vers admirables qu'on trouve dans leur pays. Hydaspe accepte leurs présens, et accorde à leurs prières la liberté de quelques-uns de leurs compatriotes, détenus dans les fers et condamnés à mort. Viennent après les députés de l'Arabie heureuse. Ils apportent une grande quantité de feuilles odoriférantes, de cinnamome, de toutes les plantes dont abonde leur pays. Tout en est parfumé. Les députés des Troglodytes sont admis après eux. Ils offrent une fourmillère d'or, une paire de gryffons, dont les rênes sont de même métal. Les Blemmyes se présentent ensuite. Ils ont une couronne de flèches, dont la pointe est d'os de dragon: Prince, disent-ils, nos présens ne sont pas aussi riches que ceux des autres députés; mais ils ne vous ont pas été inutiles sur les bords du Nil contre les Perses, et vous-même vous pouvez l'attester. Ils sont plus précieux à mes yeux, répond Hydaspe, que les dons les plus riches: c'est à eux que je suis redevable des autres. Il leur permet en même-tems de demander ce qu'ils désirent: ils demandent une diminution d'impôts; le roi les leur remet tous pour dix ans. Presque tous les ambassadeurs avoient été entendus, et avoient reçu du monarque Ethiopien des présens égaux à ceux qu'ils lui avoient apportés; la plûpart même en avoient reçu de plus magnifiques. Les derniers qui parurent, étoient les députés des Axiomites: ces peuples ne sont point tributaires, mais amis et alliés d'Hydaspe; ils viennent le féliciter de ses triomphes, et lui offrent, entre autres présens, un animal d'une espèce et d'une forme extraordinaires et surprenantes. Il est de la grandeur d'un chameau; sa peau est mouchetée et nuancée de taches de différentes couleurs: la partie postérieure jusqu'au ventre, rampe contre terre, et ressemble à celle d'un lion; mais les épaules, les pieds de devant, la poitrine n'ont aucune proportion avec ses autres membres: sur la partie antérieure s'élève un cou mince, et qui se prolonge comme celui d'un cigne; sa tête, semblable à celle d'un chameau pour la forme, est presque deux fois grosse comme celle d'un oiseau de Lybie: ses yeux terribles semblent teints de sang. Il ne marche point comme les autres animaux terrestres; il ne saute point comme les poissons; il n'avance point les pieds alternativement les uns après les autres: les deux jambes du côté droit avancent en même-tems; celles du côté gauche ensuite: tout son corps se balance lorsqu'il marche. Il est très-agile, et si bien apprivoisé qu'il se laisse conduire avec une petite corde passée autour du col: docile aux volontés de son maître, il entend ses moindres signes