Sur les genoux des célébrants reposent une hécatombe, composée de cent victimes. Après eux, suit une parade de différentes autres offrandes, marchant en ordre et divisées selon leur espèce. Des airs mystérieux et des chants préparatoires s'échappent des flûtes et divers instruments. Derrière les offrandes et ceux qui les mènent, de jeunes Thessaliennes magnifiquement habillées, aux larges ceintures et cheveux ondulants, sont divisées en deux chœurs. Dans le premier groupe, certaines portent des paniers remplis de fleurs et de fruits, d'autres transportent des corbeilles pleines de gâteaux sacrés et de parfums qui dégagent une délicieuse odeur. Organisées avec soin et symétrie, leurs fardeaux posés sur la tête, elles se tiennent par la main, pour pouvoir danser et marcher en même temps. Le second chœur entonne un hymne en l'honneur de Thétis, Pelée, leur fils et le fils d'Achille. Après elles, Cnémon intervient. Cnémon, tu dis ? Ah non, précise Cnémon, il serait dommage de passer cet hymne sous silence. Je ne vois que les célébrations mais je n'entends rien. Bien, réplique Calasiris, tu vas l'entendre, puisque tu le souhaites. Voici à peu près les paroles de l'hymne : Je chante Thétis aux cheveux dorés, fille immortelle de Nerée, dieu de la mer ; Thétis qui est devenue, sur l'ordre de Zeus, l'épouse de Pelée ; Thétis, la joaillerie de l'océan, notre protectrice, comme Aphrodite l'est de Paphos. Elle donna naissance à Achille, le terrible dieu de la guerre, le sauveur de la Grèce, dont la gloire atteint les cieux. Achille a engendré avec Pyrrha le robuste Néoptolème, le destructeur de Troie, le dernier rempart des enfants de Grèce. Sois bon avec nous, divin Néoptolème, dont les cendres reposent à Pytho ; accepte nos offrandes ; délivre-nous de toute peur. Je chante Thétis à la chevelure blonde. C'était à peu près les paroles de l'hymne, du moins celles dont je me souviens. Il y avait une telle harmonie dans ces chorales, un tel rythme dans le son des pas qui se mêlait parfaitement à la cadence de la musique que les oreilles, plus touchées encore que les yeux, recevaient tout le plaisir. Les spectateurs, se laissent emporter par cette mélodie, suit le mouvement des jeunes filles jusqu'à l'arrivée d'une troupe de jeunes hommes, et leur chef, montés sur de superbes chevaux qui font oublier l'attrait du concert. Ils s'avancent en deux groupes de vingt-cinq, escortant le chef qui se trouve au centre. Leurs chaussures sont attachées au-dessus de la cheville par une bandelette de pourpre de Phénicie, tandis qu'une boucle d'or fixe sur leur poitrine une robe blanche parsemée de points bleus. Les chevaux, tous de Thessalie, arborent dans leurs yeux la liberté de leur climat natal. Malgré leur apparent mépris pour la servitude, rognant leurs rênes et les couvrant d'écume, ils obéissent docilement à leur cavalier. Leur harnais est orné d'or et d'argent. On dirait que les jeunes Thessaliens se sont disputés l'honneur de parer leurs chevaux.