Les étincelles de cette origine italienne se propagèrent à travers l'Europe, dissipant la nuit sombre dans laquelle une horde de barbares descendus des glaces du nord l'avait enveloppée.
Aucun peuple ne possédait comme les Grecs, les dons de génie et de créativité. Cependant, il ne s'agissait pas d'une créativité colossale et mélancolique qui avait un penchant pour les ruines, caves et tombes, qui aimait uniquement décrire des objets grotesques et horribles. Leur imagination était plutôt joyeuse, ne prenant plaisir qu'à dépeindre les beautés de la nature. Elle entourait tout du charme des objets les plus délicieux, même les plus hideux se voyaient attribués des couleurs effrayantes mais non horribles. C'est cette imagination qui nous a offert une représentation de l'enfer qui touche, bouleverse l'âme, lui donne une impression d'effroi sans la faire frémir d'horreur.
C'était cette imagination qui, avec ses enchantements, avait peuplé les campagnes, les bois, les vallées et les rivières de divinités fantastiques, en attribuant à chacune des fonctions spécifiques.
Ici, sur le sommet d'une colline, résidait le chœur des neuf Muses, présidé par Apollon, dont les concerts mélodieux charmaient les habitants de l'Olympe. Plus loin, un fleuve émerge de son urne, versant des eaux qui parfois unies et paisibles, apportaient dans les campagnes la fertilité et l'abondance. Parfois agitées et enrageées, elles servaient de ministres à la vengeance du Dieu. Dans les vallées, des faunes et des satyres frivoles poursuivaient les nymphes qui s'esquivaient de leurs embrasses.
Dans ce bois, une source argentée coulait, où Diane, couverte de sueur et de poussière, venait se baigner avec ses nymphes au retour de la chasse. Dans cette île, le sombre et infatigable Dieu du feu, avec ses laborieux Cyclopes, forgeait les foudres de Jupiter. Au retour des zéphyrs, Flore, vêtue d'une robe brillante aux couleurs les plus vives, se promenait au milieu des prairies ornées de fleurs. Bientôt Pomone, couronnée de fruits, parcourait les campagnes et les vergers, promettant aux hommes une récolte abondante.
Sur les pentes couvertes de vignes, Bacchus, entouré de sa cour, ivre de joie et de vin, montrait aux hommes ce doux nectar qui allait les consoler de tous leurs travaux et de toutes leurs fatigues. Enfin, l'imagination des grecs avait transformé la nature toute entière en un vaste temple, qu'elle avait rempli de divinités de différentes sortes. Elle leur avait attribué nos passions, nos désirs, nos joies, nos tristesses, nos douleurs, les chargeant de veiller aux différentes tâches des hommes et de protéger les diverses classes de la société.
Les Grecs, dotés d'une imagination si riche et brillante, nous ont transmis les aventures galantes de leurs divinités et ont excellé dans tous les genres de littérature. Cependant, ils semblent ne pas connaître ou du moins ne pas avoir cultivé le genre le plus proche de leur qualité dominante ; ils ne nous ont laissé aucun roman. Car on ne peut certainement pas classer la "Cyropédie" parmi les romans. Il est peut-être important d'examiner ici les causes qui ont fait négliger un genre qui, chez les modernes, est devenu une mine inépuisable, exploitée avec une ardeur infatigable par le génie, la médiocrité et la sottise.