possède une arme que les anciens n’ont jamais vue, et que, parmi les modernes, lui seul connaît. C’est un tube de fer, long de deux brasses, dans lequel il met de la poudre et une balle. » Dès qu’avec le feu il touche un petit soupirail qui se trouve à l’arrière de cette canne et qui se voit à peine – comme le médecin qui effleure la veine qu’il veut alléger – la balle est chassée avec le fracas du tonnerre et de l’éclair, et comme fait la foudre à l’endroit où elle a passé, elle brûle, abat, déchire et fra- casse tout ce qu’elle touche. » À l’aide de cette arme perfide, il mit deux fois notre ar- mée en déroute, et occit mes frères. À la première rencontre, il tua le premier en lui mettant la balle au beau milieu du cœur, après avoir traversé le haubert ; dans le second combat, l’autre, qui fuyait, reçut la mort par une balle qui le frappa de loin entre les épaules et qui ressortit par la poitrine. » Quelques jours après, mon père qui se défendait dans le dernier château qui lui restait, car il avait perdu tous les autres, fut tué d’un coup semblable ; pendant qu’il allait et venait, veil- lant à ceci et à cela, il fut frappé entre les deux yeux par le traître qui l’avait visé de loin. » Mes frères et mon père morts, je restai l’unique héritière de l’île de Hollande. Le roi de Frise, qui avait l’intention bien arrêtée de prendre pied sur cet État, me fit savoir, ainsi qu’à mon peuple, qu’il m’accorderait la paix, si je voulais encore – ce que j’avais refusé auparavant – prendre pour mari son fils Ar- bant. » Moi, tant à cause de la haine que j’avais conçue pour lui et pour toute sa race infâme qui avait tué mes deux frères et mon père, et qui m’avait vaincue et dépouillée, que parce que je ne voulais pas manquer à la promesse que j’avais faite à Birène – 162 –