Mais ici la verdure était perpétuelle, perpétuelle la beauté des fleurs éternelles. Ce n’était pas que la douceur de la tempé- rature leur fût plus clémente, mais Logistilla, par sa science et ses soins, et sans avoir besoin de recourir à des moyens surna- turels, ce qui paraîtrait impossible à d’autres, les maintenait dans leur première verdeur. Logistilla témoigna beaucoup de satisfaction de ce qu’un aussi gentil seigneur fût venu à elle, et donna ordre qu’on l’accueillît avec empressement et que chacun s’étudiât à lui faire honneur. Longtemps auparavant était arrivé Astolphe, que Ro- ger vit de bon cœur. Peu de jours après, vinrent tous les autres auxquels Mélisse avait rendu leur forme naturelle. Après qu’ils se furent reposés un jour ou deux, Roger et le duc Astolphe, qui non moins que lui avait le désir de revoir le Ponant, s’en vinrent trouver la prudente fée. Mélisse parla au nom de tous les deux et supplia humblement la fée de les conseiller et de les aider, de telle sorte qu’ils pussent retourner là d’où ils étaient venus. La fée dit : « J’y appliquerai ma pensée, et dans deux jours, je te les rendrai tout prêts. » Puis elle s’entretint avec Roger et, après lui, avec le duc. Elle conclut, finalement, que le destrier volant devait retourner le premier aux rivages aquitains. Mais auparavant elle veut lui façonner un mors avec lequel Roger puisse diriger ou modérer sa course. Elle lui montre comment il lui faudra faire, quand il voudra qu’il monte, qu’il descende, qu’il vole en tournant, qu’il aille vite ou qu’il se tienne immobile sur ses ailes. Tout ce qu’un cavalier a coutume de faire avec un beau destrier sur la terre ferme, ainsi Roger, qui en devint complètement maître, faisait par les airs, avec le destrier ailé. – 189 –