Pendant ce temps, Roger, après avoir cherché pendant longtemps en vain dans 1’espoir de découvrir Angélique, s’apercevant enfin de son erreur et qu’elle s’était éloignée et ne l’entendait plus, était retourné à l’endroit où il avait laissé son cheval, pensant reprendre son voyage au ciel et sur terre. Mais il se trouva que le cheval, s’étant débarrassé du mors, s’élevait dans les airs en pleine liberté. Roger fut très affecté, après sa déception, de se voir encore séparé du cheval-oiseau. Cette nouvelle mésaventure, non moins que la tromperie de femme dont il a été victime, lui op- presse le cœur. Mais ce qui lui pèse plus que l’une et l’autre, et ce dont il éprouve un sérieux ennui, c’est d’avoir perdu le pré- cieux anneau, non pas tant à cause du pouvoir qui est en lui, que parce qu’il lui avait été donné par sa dame. Tout dolent, il endossa de nouveau ses armes et remit l’écu à son épaule. Puis il s’éloigna de la mer, à travers les plaines herbeuses, et prit son chemin par une large vallée où, au milieu de hautes forêts pleines d’ombres, il vit le sentier le plus large et le plus fréquenté. Il ne va pas longtemps, sans entendre à sa droite, à l’endroit le plus touffu, un grand bruit retentir. Il entend un bruit épouvantable, mêlé à un choc d’armes. Il hâte le pas parmi le taillis, et trouve deux guerriers en grande bataille, dans une étroite clairière. Leurs regards n’ont point de merci ; ils semblent poursuivre je ne sais quelle dure vengeance. L’un est un géant à l’aspect féroce, l’autre est un franc et hardi chevalier. Ce dernier se défend avec l’écu et l’épée, bondissant deçà, delà, pour ne pas être atteint par la massue que le géant brandit dans ses deux mains et dont il le menace sans cesse. Son cheval est étendu mort sur la route. Roger s’arrête, attentif au combat, et, au fond de l’âme, il désire que le chevalier soit vainqueur. – 203 –