dessein que j’ai depuis conçu ; maintenant je l’ai résolu, et j’espère pouvoir l’accomplir sans peine. » Roland ne put se contenir plus longtemps ; il cria : « Men- teur, brute de païen, en quel pays, à quel moment m’as-tu tenu en ton pouvoir, les armes à la main ? Ce paladin que tu vas te vantant d’avoir vaincu, c’est moi. Tu pensais qu’il était loin. Or, voyons si tu pourras m’enlever le casque, ou si je suis bon pour t’enlever à toi-même tes autres armes ? » Je ne veux pas conserver sur toi le moindre avantage. » Ainsi disant, il délace son casque et le suspend à une branche de hêtre. En même temps, il tire Durandal. Ferragus, sans perdre le moins du monde courage, tire son épée et se met en position, de manière à pouvoir avec elle et avec son écu levé, couvrir sa tête nue. Les deux guerriers commencèrent par faire décrire un cer- cle à leurs chevaux, tentant avec le fer le défaut de leurs cuiras- ses. Il n’y avait pas dans le monde entier un autre couple qu’on eût pu comparer à celui-là. Égaux en force et en vaillance, ils ne pouvaient se blesser ni l’un ni l’autre. Car vous avez déjà entendu dire, mon seigneur, que Ferra- gus était invulnérable sur tout le corps, excepté à l’endroit où l’enfant prend sa première nourriture, alors qu’il est encore dans le ventre de sa mère. Jusqu’au jour où la pierre sombre du tombeau lui recouvrit la face, il porta sur cette partie, où il était accessible, sept plaques d’acier de la meilleure trempe. Le prince d’Anglante était également invulnérable sur tout le corps, hors une partie. Il pouvait être blessé sous la plante des pieds ; mais il la garantissait avec beaucoup de soin et d’art. Le reste de son corps était plus dur que le diamant, si la renommée nous a rapporté la vérité. L’un et l’autre, à la poursuite de leurs – 227 –