aujourd’hui son désir. » Ainsi elle allait, s’accusant elle-même d’avoir privé Roland de son casque. Mécontente et de mauvaise humeur, elle prit le chemin qui lui parut le meilleur pour aller vers l’Orient. La plupart du temps, elle marchait invisible ; d’autres fois elle se montrait, selon qu’il lui semblait opportun, et selon les gens qu’elle ren- contrait. Après avoir vu de nombreux pays, elle arriva à un bois où elle trouva un jouvenceau blessé au beau milieu de la poi- trine, et gisant entre deux de ses compagnons morts. Mais je n’en dirai pas davantage pour le moment sur Angé- lique, car j’ai beaucoup de choses à vous raconter avant de reve- nir à elle. Je ne consacrerai pas non plus, du moins de long- temps, d’autres vers à Ferragus et à Sacripant. Je suis forcé de les laisser pour le prince d’Anglante, dont je dois m’occuper avant tous les autres. Je dois dire les fatigues et les angoisses éprouvées par lui à la pour suite du grand désir qu’il ne parvint jamais à satisfaire. À la première cité qu’il trouve sur son chemin, comme il a grand soin de voyager incognito, il met sur sa tête un casque nouveau, sans regarder si la trempe en est faible ou forte. Qu’elle soit ce qu’elle voudra, peu lui importe, puisqu’il est ras- suré par l’enchantement qui le rend invulnérable. Ainsi couvert, il poursuit sa recherche ; le jour, la nuit, la pluie, le soleil ne peuvent l’arrêter. À l’heure où Phébus fait sortir de la mer ses chevaux au poil humide, où l’Aurore s’en vient parsemer tout le ciel de fleurs jaunes et vermeilles, où les étoiles abandonnant leurs chœurs nocturnes ont déjà disparu sous un voile, Roland, passant un jour près de Paris, donna une preuve éclatante de sa valeur. Il se rencontra avec deux escadrons. Le premier était conduit par Manilard, Sarrasin aux cheveux blancs, roi de Nori- – 231 –