De jour on n’aurait pu la découvrir, mais de nuit, la lumière qui s’en échappait la faisait apercevoir. Roland s’imaginait bien ce que c’était. Pourtant il voulait en être plus certain ; après avoir attaché Bride-d’Or en dehors, il s’approche doucement de la grotte, et écartant les rameaux touffus, il entre par l’ouverture, sans se faire annoncer. Il descend plusieurs degrés dans cette tombe où les gens sont ensevelis vivants. La grotte, taillée au ciseau, était très spa- cieuse et n’était pas tout à fait privée de la lumière du jour, bien que l’entrée en laissât passer fort peu. Mais il en venait beau- coup d’une fenêtre qui s’ouvrait dans un trou du rocher à main droite. Au milieu de la caverne, près d’un feu, était une dame à l’aspect agréable. Elle avait à peine dépassé quinze ans, comme il parut au comte au premier abord. Et elle était si belle, qu’elle changeait ce lieu sauvage en paradis, bien qu’elle eût les yeux baignés de larmes, signe manifeste d’un cœur dolent. Près d’elle était une vieille ; elles semblaient en grande contestation, comme les femmes font souvent entre elles. Mais dès que le comte fut entré, elles se turent. Roland s’empressa de les saluer d’un air courtois, ainsi qu’il faut toujours faire avec les dames. Et elles, se levant aussitôt, lui rendirent gracieusement son salut. Il est vrai qu’elles s’effrayèrent un peu en entendant à l’improviste sa voix, et en voyant entrer, armé de toutes pièces, un homme qui paraissait si terrible. Roland demanda qui pou- vait être assez discourtois, injuste, barbare et atroce, pour tenir enseveli dans cette grotte un visage si gentil et si digne d’amour. La jeune fille lui répondit d’une voix faible et entrecoupée de profonds sanglots. Aux doux accents de sa voix, on eût dit que les perles et le corail s’échappaient de sa bouche. Les larmes – 236 –