» Tant qu’elle vivra, le Maure, et Sforce et les couleuvres des Visconti seront redoutés, des neiges hyperboréennes aux rivages de la mer Rouge, de l’Inde aux monts qui donnent pas- sage à la mer. Elle morte, eux et le royaume d’Insubrie tombe- ront en esclavage, au grand dommage de toute l’Italie. Sans elle la suprême prudence paraîtra aventureuse. » Il en existera encore d’autres, portant le même nom, et qui naîtront bien des années avant elle. L’une d’elles ornera ses beaux cheveux de la splendide couronne de Pannonie. Une au- tre, après avoir délaissé les biens terrestres, sera placée au nombre des saintes sur la terre d’Ausonie et se verra rendre un culte et élever des autels. » Je me tairai sur les autres, car, comme j’ai dit, il serait trop long de parler de toutes, bien que chacune pût faire l’objet d’un chant héroïque et éclatant. Je passerai sous silence les Blanche, les Lucrèce, les Constance et les autres, mères ou répa- ratrices de tant d’illustres maisons qui régneront en Italie. » Plus que toutes celles qui ont jamais existé, ta maison se- ra célèbre par ses femmes, et je ne sais si elle ne le sera pas plus par les qualités des filles, que par la haute chasteté des épouses. Sache également à ce sujet que Merlin m’a éclairée sur ce point, pensant que j’aurais peut-être à te le répéter. J’ai donc un vif désir de t’en entretenir. » Et je te parlerai d’abord de Ricciarda, modèle de courage et de chasteté. Jeune encore, elle restera veuve et en proie aux coups de la fortune, ce qui arrive souvent aux meilleurs. Elle verra ses fils dépouillés du royaume paternel, errer en exil sur la terre étrangère, laissant leurs jeunes enfants aux mains de leurs ennemis. Mais elle finira par être amplement dédommagée de ses malheurs. – 251 –