fin dans un charmant petit bois, que doucement caresse une fraîche brise. Deux clairs ruisseaux murmurant tout autour, y tiennent les herbes toujours tendres et nouvelles, et font un doux concert à l’oreille, en se brisant et en courant lentement à travers de petites roches. Là, pensant être en sûreté et à mille milles de Renaud, fati- guée de la route et brûlée par la chaleur, elle se décide à se repo- ser un peu. Elle descend de cheval parmi les fleurs, et laisse aller à la pâture le palefroi débarrassé de sa bride. Celui-ci s’en va errer autour des claires ondes dont les bords étaient remplis d’une herbe fraîche. Non loin de là, Angélique voit un beau buisson d’épines fleuries et de roses vermeilles, qui se penche sur le miroir des eaux limpides, garanti du soleil par les grands chênes ombreux. Au milieu est un espace vide, de sorte qu’il forme comme une chambre fraîche parmi des ombres plus épaisses. Et les feuilles s’entremêlent aux rameaux, de façon que le soleil, ni le moindre regard, n’y peuvent pénétrer. Au dedans, les herbes tendres y font un lit invitant à s’y re- poser quiconque s’en approche. La belle dame se place tout au milieu. Là, elle se couche et s’endort. Mais elle ne reste pas long- temps ainsi, car il lui semble qu’un bruit de pas vient jusqu’à elle. Inquiète, elle se lève et, près de la rivière, elle voit qu’un chevalier armé est venu. S’il est ami ou ennemi, elle l’ignore. La crainte, l’espérance, le doute lui secouent le cœur. Elle attend la fin de cette aven- ture, et d’un seul soupir se garde de frapper l’air. Le chevalier descend sur la rive du fleuve ; sur l’un de ses bras il laisse repo- ser sa joue, et il se plonge dans une si profonde rêverie, qu’il paraît changé en une pierre insensible. – 26 –