dats français. On le voit alors fracasser plus d’un front, prati- quer des tonsures plus larges que celles des moines, faire voler les bras et les têtes, et pleuvoir, du haut des remparts dans le fossé, un fleuve de sang. Le païen jette son écu, prend à deux mains sa redoutable épée et fond sur le duc Arnolf. Celui-ci venait du pays où le Rhin verse ses eaux dans un golfe salé. Le malheureux ne se défend pas mieux que le soufre ne résiste au feu. Il tombe à terre et ex- pire, la tête fendue jusqu’à une palme au-dessous du col. D’un seul coup de revers, Rodomont occit Anselme, Ol- drade, Spinellaque et Prandon ; car l’étroitesse du lieu et la foule épaisse des combattants font que l’épée porte en plein. Les deux premiers sont perdus pour la Flandre, les deux autres pour la Normandie. Le Sarrasin fend ensuite en deux, depuis le front jusqu’à la poitrine, et de là jusqu’au ventre, le Mayençais Orger. Il précipite du haut des créneaux dans le fossé, Andropon et Mosquin. Le premier est prêtre ; le second n’adore que le vin ; il en a plus d’une fois vidé un baquet d’une seule gorgée, fuyant l’eau comme si c’était du poison ou du sang de vipère. Il trouve la mort aux pieds des remparts, et ce qui l’ennuie le plus, c’est de se sentir mourir dans l’eau. Rodomont taille en deux Louis de Provence, et perce de part en part Arnauld de Toulouse. Obert de Tours, Claude, Ugo et Denis exhalent leur vie avec leur sang. Près d’eux tombent Gauthier, Satallon, Odon et Ambalde, tous les quatre de Paris, et un grand nombre d’autres dont je ne saurais dire les noms et le pays. Derrière Rodomont, la foule des Sarrasins applique les échelles et monte de toutes parts. Les Parisiens ne leur tiennent pas tête, tellement ils ont peu réussi dans leur première défense. Ils savent bien qu’il reste encore beaucoup à faire aux ennemis – 280 –