il lui semble que tuer un homme enchaîné lui sera reproché comme une lâcheté plutôt que compté comme un acte de cou- rage. Il voit en effet que le géant a les bras, les pieds et le cou liés de telle sorte qu’il ne peut faire un mouvement. Le filet avait été jadis fait par Vulcain d’un fil d’acier très subtil, mais avec un art tel qu’on aurait perdu sa peine à cher- cher à en dénouer la moindre partie. C’était celui qui avait lié les pieds et les mains de Vénus et de Mars. Le jaloux l’avait fait dans l’unique intention de les saisir tous les deux ensemble au lit. Mercure le vola plus tard au forgeron, lorsqu’il voulut s’emparer de Chloris, de Chloris la belle, qui voltige par les airs derrière l’Aurore, au lever du soleil, et s’en va répandant les lis, les roses et les violettes contenus dans les pans de sa robe. Mer- cure guetta tellement cette nymphe, qu’un jour il la saisit dans l’air avec le filet. Il paraît que la déesse fut prise en volant près de l’endroit où le grand fleuve d’Éthiopie entre dans la mer. Le filet fut en- suite conservé pendant plusieurs siècles à Canope, dans le tem- ple d’Anubis. Trois mille ans après, Caligorant l’enleva du lieu consacré. Le voleur impie emporta le filet, après avoir brûlé la ville et dépouillé le temple. Il sut l’installer sur le sable de telle façon que tous ceux auxquels il faisait la chasse venaient y donner en plein. À peine l’avaient-ils touché, qu’il leur liait le cou, les pieds et les bras. Astolphe, après en avoir enlevé une chaîne, lia les mains, les bras et la poitrine du félon de façon qu’il ne pût pas se dégager, puis il le laissa se lever, Après l’avoir serré dans de nouveaux nœuds. Le géant était devenu plus doux qu’une damoiselle. Astolphe se décide a l’emmener avec lui, et à le montrer par les villas, les cités et les – 295 –