Chant XVII ARGUMENT. – Charles exhorte ses paladins, et attaque avec eux les ennemis. – Griffon, Origile et Martan arrivent à Damas, à la fête donnée par Norandin. Griffon est vainqueur du tournoi ; Martan y montre une grande couardise, mais il usurpe l’honneur de la victoire, tandis que Griffon ne reçoit que honte et outrages. Quand nos péchés ont dépassé la mesure du pardon, Dieu, pour prouver que sa justice égale sa miséricorde, confie souvent le pouvoir souverain à des tyrans atroces, à des monstres. Il leur donne la force et le génie du mal. C’est pour cela qu’il mit au monde Marius, Sylla, les deux Néron, Caïus Caligula le Furieux ; Domitien et le dernier Antonin ; qu’il tira Maximin de la plèbe immonde et basse, et l’éleva à l’empire ; qu’il fit naître à Thèbes Créonte, et donna au peuple d’Agylla Mézence, qui en- graissa les sillons de sang humain ; c’est pour cela que, dans des temps moins reculés, il permit que l’Italie devînt la proie des Huns, des Lombards et des Goths. Que dirai-je d’Attila ? que dirai-je de l’inique Ezzelin da Romano, et de cent autres que Dieu, après de longs siècles de crimes, envoya pour nous punir et nous opprimer ? Et ce n’est pas seulement dans les temps antiques que nous avons de tels exemples ; nous en faisons de nos jours une claire expérience, nous qui, troupeaux inutiles et coupables dès le berceau, avons été donnés en garde aux loups enragés. Comme si leur faim était trop vite apaisée, et que leur ven- tre ne pût contenir tant de chair, ceux-ci ont appelé des bois – 324 –