Italie, sentine infecte de tous les vices, tu dors ivre, et tu ne rou- gis pas de te voir devenue l’esclave tantôt d’une nation, tantôt d’une autre, qui toutes te furent asservies. Si la crainte de mourir de faim dans tes tanières, ô Suisse, t’amène en Lombardie, et te fait chercher parmi nous quelqu’un qui te donne du pain ou qui te délivre de ta misère en te menant à la mort, sache que les Turcs et leurs immenses richesses ne sont pas loin. Chasse-les d’Europe, ou déloge-les tout au moins de la Grèce : ainsi tu pourras te rasseoir, ou tomber avec plus de gloire. Ce que je te dis, je le dis aussi à l’Allemand ton voisin. En Turquie sont les richesses que Constantin transporta de Rome. Il y porta ce qu’il y avait de meilleur, et il lui fit don du reste. Le Pactole et l’Hermus, d’où l’on extrait l’or fin, la Migdonie, la Ly- die et tout ce riche pays que tant d’historiens ont rendu célèbre, ne sont pas trop éloignés pour que vous ne puissiez y aller, si cela vous plaît. Et toi, grand Léon, sur lequel pèse le poids lourd des clefs du ciel, ne laisse pas l’Italie se plonger ainsi dans le sommeil, puisque tu as la main dans ses cheveux. Tu es le Pasteur, et Dieu t’a donné la houlette à porter ; il t’a nommé d’un nom redouta- ble, afin que tu rugisses, et que tu étendes les bras pour défen- dre le troupeau des loups. Mais, d’une pensée à une autre, comment me suis-je laissé entraîner si loin du chemin que je suivais ? Je ne crois cepen- dant pas m’en être tellement écarté que je ne sache le retrouver encore. Je disais donc qu’en Syrie on avait l’habitude de s’armer comme les Français de cette époque ; de sorte que la place de Damas resplendissait de chevaliers portant casques et cuirasses. Du haut de leurs balcons, les belles dames jettent sur les jouteurs des fleurs jaunes et vermeilles, pendant que ceux-ci, au – 340 –