» Il n’est pas besoin, pour me convaincre qu’elles sont à vous, d’y voir gravée votre devise ; il suffit que vous me le di- siez ; je crois à votre parole plus qu’à cet autre témoignage. Du reste, ces armes sont à vous comme juste récompense de la plus haute valeur. Gardez-les donc sans plus de contestation. Griffon recevra de moi un prix encore plus grand. » Griffon qui tenait peu à ces armes, mais qui avait un grand désir de satisfaire le roi, lui dit : « Je serai assez récompensé si vous me dites que vous êtes content de moi. » Pendant ce temps, Marphise se disait à elle-même : « Il me semble que tout l’honneur est ici pour moi. » Et d’un air gracieux elle offrit les armes à Griffon, et finalement les reçut en don de sa main. Puis ils retournèrent paisiblement et en bonne intelligence à la ville, où les fêtes recommencèrent. L’honneur et le prix de la joute furent décernés à Sansonnet, car Astolphe, les deux frères et celle qui valait mieux qu’eux tous, Marphise, ne voulurent pas lutter, désirant, en amis et en bons compagnons, que Sansonnet gagnât le prix. Après être restés pendant huit ou dix jours auprès de No- randin, au sein des plaisirs et des fêtes, l’amour du beau pays de France les prit et ne leur laissa plus de repos. Ils prirent congé, et Marphise, qui désirait suivre la même route, leur tint compa- gnie. Depuis longtemps Marphise voulait se mesurer avec les paladins, Et juger, par expérience, si leurs exploits étaient à la hau- teur de leur renom. Sansonnet laissa un autre chevalier pour gouverner à sa place la régence de Jérusalem. Tous les cinq, ré- unis en une seule troupe dont on aurait difficilement trouvé la pareille au monde, prirent congé de Norandin, et arrivèrent à Tripoli et à la mer qui l’avoisine. – 378 –