Quelques chevaliers sont avec lui. De loin ils aperçoivent les deux compagnons, et tous se précipitent de leur côté, dans l’espoir d’y trouver une proie et du butin. « Frère – dit Cloridan – il faut jeter là notre fardeau et jouer des talons. Ce serait folie de sacrifier deux vivants pour sauver un mort. » Et il se débarrasse de sa charge, pensant que Médor en fait de même. Mais ce dernier, plus attaché à son maître, le prend tout entier sur ses épaules. L’autre s’éloigne en toute hâte, comme s’il avait son ami à ses côtés ou derrière lui. S’il avait su qu’il l’abandonnait, il aurait bravé avec lui mille morts plutôt qu’une. Les chevaliers, résolus à forcer les fugitifs à se rendre, ou à les immoler, se répandent de çà de là, et ferment promptement toutes les issues. Zerbin, leur capitaine, est le plus acharné à les poursuivre ; car, en les voyant fuir tout tremblants, il est per- suadé que ce sont deux soldats de l’armée ennemie. À cette époque, il y avait là une antique forêt, dont les tail- lis épais et hérissés de ronces, étaient sillonnés par des sentiers étroits qui s’entre-croisaient comme un labyrinthe, et ne pou- vaient servir qu’aux bêtes sauvages. Les deux païens espèrent qu’ils pourront se cacher dans ses fourrés. Mais que ceux qui prennent plaisir à mes chants, remettent à une autre fois pour entendre le reste. – 390 –