et, de l’endroit où il est caché, il ajuste si bien, qu’il transperce la cervelle d’un Écossais. Celui-ci tombe de selle, sans vie. Tous les autres se tournent du côté d’où est venu le trait homicide. Pendant ce temps, le Sarrasin envoie une autre flèche qui couche, près du premier, un second cavalier. Celui-ci s’était penché vivement pour demander à son compagnon tombé s’il savait qui avait tiré, quand la flèche arrive, lui traverse la gorge et lui coupe la parole. À cette vue, Zerbin, leur capitaine, ne peut plus se contenir. Plein de colère et de fureur, il court à Médor, criant : « C’est toi qui le paieras. » Il plonge sa main dans sa chevelure d’or et l’attire violemment à lui. Mais à peine a-t-il jeté les yeux sur ce charmant visage, qu’il est pris de pitié et ne se sent pas le cou- rage de le tuer. Le jouvenceau a recours aux prières ; il dit : « Chevalier, au nom de ton Dieu, ne sois pas assez cruel pour m’empêcher d’ensevelir le corps de mon roi. Ne pense pas que je réclame autre chose de ta pitié, et que je tienne à la vie. Je ne désire la conserver qu’autant qu’elle me permettra de donner la sépul- ture à mon maître. » Tu pourras, après, si tu es aussi cruel que Créon le Thé- bain, donner mes membres en pâture aux bêtes et aux oiseaux de proie ; mais laisse-moi d’abord ensevelir le fils d’Almonte. » Ainsi disait Médor, avec des gestes, avec un son de voix capables d’attendrir une montagne. Zerbin en était déjà si touché, qu’il se sent ému de tendresse et de pitié. En ce moment, un chevalier brutal, sans respect pour son prince, transperce d’un coup de lance la poitrine sans défense du malheureux suppliant. Cet acte barbare et déloyal irrite d’autant plus Zerbin qu’il voit le jeune homme tomber sous le coup, pâle et évanoui, et le considère comme mort. – 393 –