dépérit, comme fond une flaque de neige tombée dans une sai- son intempestive, et que le soleil frappe à découvert. Si elle ne veut pas mourir de désir, il faut que sans retard elle se vienne elle-même en aide. Elle ne peut plus attendre qu’on lui demande ce qu’elle brûle de donner. Aussi, bannissant toute vergogne, elle emploie, pour se faire comprendre, un lan- gage non moins ardent que ses yeux. Et, du coup, elle réclame merci, sans savoir que peut-être elle l’accorde elle-même. Ô comte Roland, ô roi de Circassie, dites, à quoi vous a ser- vi votre éclatante valeur ? Dites, à quel prix doit-on estimer vo- tre gloire sans pareille ? Quelle récompense ont obtenue vos services ? Montrez-moi une seule faveur, ancienne ou nouvelle, que vous ait jamais accordée, en retour de votre dévouement, celle pour qui vous avez tant souffert. Oh ! si tu pouvais jamais revenir à la vie, combien ta peine serait cruelle, ô roi Agrican, toi envers qui elle se montra si dé- daigneuse, et qu’elle repoussa d’une façon si dure et si inhu- maine ! Et toi, Ferragus, et vous, au nombre de plus de mille, dont je passe les noms, qui avez accumulé tant de prouesses pour cette ingrate, combien il vous serait douloureux de la voir maintenant aux bras de celui-ci ! Angélique laissa cueillir à Médor la première rose, non en- core effleurée, du beau jardin où personne n’avait été assez heu- reux pour mettre les pieds. Afin de légitimer sa faiblesse, on cé- lébra les saintes cérémonies du mariage, sous les auspices de l’amour, et avec la femme du berger pour marraine. Sous cet humble toit, les noces furent faites aussi solennel- lement que possible, et pendant plus d’un mois les deux amants goûtèrent en paix de tranquilles plaisirs. La dame ne voyait rien au-dessus du jouvenceau, et ne pouvait s’en rassasier. Bien – 397 –