côté et ne semble pas vouloir prendre part à la lutte commune. Sa courtoisie l’empêche de profiter de la loi du pays. Il se retire de côté, et regarde ce qu’une seule lance pourra faire contre neuf. Le destrier, à l’allure douce et ferme à la fois, porte rapi- dement la jeune guerrière à la rencontre de ses adversaires. Pendant sa course, Marphise met en arrêt sa lance, si lourde que quatre hommes auraient peine à la soutenir. En quittant le na- vire, elle l’avait choisie, comme la meilleure, entre beaucoup d’autres. L’air terrible dont elle s’avance fait pâlir mille visages, fait tressaillir mille cœurs. Elle ouvre la poitrine du premier qu’elle rencontre, aussi facilement que si elle avait été nue ; elle transperce sa cuirasse, sa cotte de mailles, après avoir percé d’outre en outre son épais bouclier garni d’acier. On voit le fer sortir d’une coudée derrière les épaules, tellement le coup fut terrible. Marphise laisse en arrière cet adversaire avec la lance enfoncée dans la poitrine, et se jette à toute bride sur les autres. Elle culbute celui qui vient le second ; elle rompt les reins au troisième d’un coup terrible, et les jette tous deux, sans vie, hors de selle, tellement le choc est rude, et l’attaque rapide. J’ai vu les bombardes ouvrir les escadrons de la même façon que Marphise fait pour cette troupe. Sur elle plus d’une lance est rompue, mais les coups ne semblent pas plus l’ébranler que les grosses balles n’ébranlent le mur d’un jeu de paume. La trempe de son haubert est si dure, que les plus rudes chocs ne peuvent rien contre lui. Il a été forgé par enchantement aux feux de l’enfer et trempé dans les eaux de l’Averne. Parvenue à l’extrémité de la lice, elle fait faire volte-face à son destrier, l’arrête un instant, puis le lance avec impétuosité – 407 –