contre les autres, les disperse, les abat, et teint son épée de sang jusqu’à la garde. Elle enlève à l’un la tête, à l’autre le bras ; elle en coupe un autre en deux, de telle sorte que le buste, avec la tête et les bras, roule à terre, tandis que le ventre et les jambes restent en selle. Elle le coupe en deux, ai-je dit, droit entre les côtes et les hanches, et le fait ressembler à ces figures d’argent ou de cire pure, que les pèlerins placent en ex-voto devant les images des saints, pour les remercier des grâces qu’ils leur ont fait obtenir. Puis, elle se met à la poursuite d’un autre qui fuit ; il n’est pas arrivé au milieu de la lice, qu’elle l’atteint, et lui partage la tête et le cou, de telle façon que jamais médecin ne put les rajus- ter. En somme, elle tue l’un après l’autre tous ses adversaires, ou bien elle les blesse si grièvement, qu’elle les met dans l’impossibilité de se relever et de continuer la lutte. Le chevalier qui avait conduit les neuf autres, s’était tenu pendant tout ce temps dans un coin de la lice, parce qu’il lui semblait injuste et déloyal d’attaquer avec tant d’avantage un seul adversaire. Maintenant qu’il voit toute sa troupe tombée sous une seule main, il s’avance pour bien montrer que s’il n’a point pris part à la lutte, c’est par courtoisie et non par crainte. Il fait signe avec la main qu’avant de combattre il a quelque chose à dire ; et ne pensant pas que, sous des dehors si virils, il a affaire à une jeune fille, il dit à son adversaire : « Chevalier, tu dois être fatigué d’avoir tué tant de gens, et ce serait montrer peu de courtoisie que de profiter aujourd’hui de ta lassitude. » Si tu veux te reposer jusqu’au lever du soleil, puis revenir demain au champ clos, je te l’accorde. Il me reviendrait peu d’honneur de me mesurer aujourd’hui avec toi, car je crois que tu dois être fatigué et las. » « Combattre sous les armes n’est pas – 408 –