ou l’ignorance des écrivains avait tenu dans l’ombre les éloges qui leur étaient dus. À ce qu’il me semble, les femmes de notre siècle se distin- guent par de tels mérites, que nous pouvons sans crainte consa- crer nos écrits à transmettre leur souvenir aux siècles futurs, afin que les attaques odieuses des méchants soient noyées dans une éternelle infamie ; aussi la gloire de nos contemporaines apparaîtra si éclatante, qu’elle surpassera de bien loin celle de Marphise. Mais revenons à cette dernière. La jeune fille ne refuse pas de se faire connaître au chevalier qui a été si courtois envers elle et qui paraît tout disposé, lui aussi, à lui apprendre qui il est. Elle se libère sur-le-champ de sa dette, et lui dit le nom qu’il désire savoir : « Je suis Marphise – dit-elle. » Et c’est assez, car le reste est connu de tout l’univers. L’autre commence, son tour venu, à se faire connaître d’une manière plus détaillée, en disant : « Je crois que chacun de vous a présent à la mémoire le nom de ma famille. Ce n’est pas seulement la France, l’Espagne et les pays voisins, mais l’Inde, l’Éthiopie et les contrées glacées du Pont, qui connais- sent l’illustre maison de Clermont d’où sont sortis le chevalier qui tua Almonte79, » Et celui qui donna la mort à Clariel et à Mambrin 80, et détruisit leur empire. Je suis de ce sang. À l’endroit où l’Ister vient se jeter, par huit ou dix bouches, dans le Pont-Euxin, ma mère m’engendra du duc Aymon, qui était arrivé dans ce pays comme voyageur. Il y a un an bientôt que je l’ai laissée dans les pleurs, pour aller en France retrouver ma famille. 79 Roland. 80 Renaud. – 414 –