colline et descend rapidement dans la plaine. Il regarde Zerbin, et à première vue il le tient pour un chevalier de grande estime. Il s’approche, il lui demande pourquoi il est enchaîné, et où on le conduit. Le dolent chevalier lève la tête, et, après avoir écouté ce que lui dit le paladin, il lui raconte la vérité ; il la lui expose avec un tel accent de sincérité que le comte le juge digne de sa protection, persuadé qu’il est innocent et qu’il n’a point mérité la mort. Mais, quand il apprend que l’arrêt a été rendu par le comte Anselme d’Hauterive, il ne doute plus de son injustice, car ce félon n’a pas d’autres façons d’agir. En outre, il sent se réveiller l’antique haine qui divise la maison de Mayence et celle de Clermont, et qui a causé à toutes deux tant de sang, tant de rui- nes et tant de hontes. « Déliez ce chevalier, canaille, – crie le comte aux manants, – ou je vous extermine. » « Quel est celui-ci qui se vante de por- ter de tels coups ? – répond un des hommes d’armes qui veut payer d’assurance. – Si nous étions de cire ou de paille et que lui-même fût de feu, sa menace pourrait peut-être nous épou- vanter. » Et il se précipite sur le paladin de France, qui abaisse sa lance contre lui. Le Mayençais avait sur son dos la brillante armure enlevée pendant la nuit à Zerbin ; mais elle ne peut le défendre contre le coup terrible porté par le paladin et qui le frappe à la joue droite. Le casque n’est point entamé, car il est de fine trempe, mais le choc est si grand, que le malheureux a le cou rompu et tombe mort. Roland poursuit sa course ; sans déranger sa lance, il en transperce un autre de part en part. Puis il la jette, tire Duran- dal et se précipite au plus épais de la troupe, à l’un, il fend la tête en deux ; à l’autre il la coupe net au ras du buste ; il perce la – 491 –