moi. J’arrive enfin sur le rivage, à l’endroit où je les avais lais- sés ; je regarde, et je ne vois rien, si ce n’est quelques traces en- core fraîches sur le sable. » Je suis cette piste qui me conduit dans un bois sauvage ; à peine y eus-je pénétré, que, guidé par des gémissements qui frappaient mon oreille, je retrouvai Corèbe gisant à terre. Je lui demandai ce qu’il était advenu de la dame et d’Odoric, et qui l’avait ainsi blessé lui-même. Dès que je sus la vérité, je me mis à courir après le traître, cherchant à travers tous ces ravins. » Je tournai ainsi tout un jour, sans retrouver aucun ves- tige. Enfin je revins à l’endroit où gisait Corèbe, dont le sang avait tellement rougi la terre tout autour de lui, que, s’il était resté un peu plus dans cet état, il aurait eu plutôt besoin d’une fosse et d’un prêtre ou d’un moine pour l’enterrer que d’un mé- decin ou d’un lit pour le guérir. » Je le fis transporter du bois dans la ville, et le fis déposer dans la maison d’un hôtelier de mes amis. Là, par les soins et l’art d’un vieux médecin, il fut promptement guéri. Puis, nous étant munis d’armes et de chevaux, Corèbe et moi, nous nous mîmes à la recherche d’Odoric, que nous retrouvâmes à la cour du roi Alphonse de Biscaye ; là, je lui livrai bataille. » La justice du roi, qui m’accorda le combat, le bon droit et, en outre du bon droit, la fortune, qui donne trop souvent la vic- toire à qui il lui plaît, tout cela m’aida à triompher du traître. Je le fis prisonnier. Le roi, instruit de son crime abominable, me permit d’en faire ce que je voudrais. » Je n’ai pas voulu le tuer ni le laisser mettre à mort ; mais, comme tu vois, je résolus de te l’amener enchaîné, car je pense que c’est à toi de le juger et de dire s’il doit mourir ou subir tout autre châtiment. J’avais entendu raconter que tu étais auprès de Charles, et je m’y rendais dans le désir de t’y retrouver. Je rends – 513 –