armes jettent au ciel des milliers d’étincelles, et sont comme deux flambeaux embrasés. L’âpre bataille se poursuit entre les deux rois, sans qu’aucun d’eux éprouve le besoin de se reposer ou de reprendre haleine. Ils cherchent, d’un côté ou d’autre, à ouvrir les pièces de leurs armures, à pénétrer à travers les mailles. Ni l’un ni l’autre ne perd ou ne gagne du terrain. Mais, comme s’ils étaient entourés d’un fossé ou d’une muraille, ils ne s’écartent pas d’un pouce du cercle étroit où ils combattent. Au milieu de mille coups, le Tartare frappe une fois à deux mains sur le front du roi d’Alger et lui fait voir autant de lumiè- res et d’étincelles qu’il y en eut jamais. L’Africain sent sa force l’abandonner ; sa tête va toucher la croupe de son cheval ; il perd les étriers et, sous les yeux de celle qu’il aime tant, il est près de tomber de selle. Mais, de même que l’arc de fin acier, solide et bien trempé, se redresse avec d’autant plus de force qu’il a été plus courbé par le martinet et le levier, et rend plus de mal qu’il n’en a reçu, ainsi l’Africain se relève aussitôt, et porte à son ennemi un coup deux fois plus fort. Rodomont frappe le fils du roi Agrican juste à l’endroit où il a été frappé lui-même. Il ne peut cependant lui blesser le vi- sage, défendu par les armes troyennes ; mais il étourdit telle- ment le Tartare, qu’il ne sait pas s’il fait jour ou s’il fait nuit. Ro- domont, plein de fureur, porte sans s’arrêter un autre coup qu’il dirige contre la tête. Le cheval du Tartare, effrayé par l’épée qui siffle en retom- bant de haut, fait un saut en arrière pour l’éviter, et vient ainsi, à son propre détriment, en aide à son maître. L’épée le frappe, au beau milieu de la tête, d’un coup destiné au cavalier et non à lui. – 528 –