véridique. Soudain arriva Fleur-d’Épine, dame d’Espagne, qui était venue pour chasser dans le bois. » En voyant ma sœur revêtue entièrement de son armure, excepté le visage, et portant l’épée en guise de quenouille, elle la prit pour un chevalier. À force de considérer sa figure et ses grâ- ces viriles, elle s’en sentit le cœur épris. Elle l’invita à la suivre à la chasse, et parvint à l’attirer loin de ses compagnons, dans l’endroit le plus touffu. » Seule avec elle en ce lieu solitaire où elle ne craint pas d’être surprise, elle lui découvre peu à peu, par ses gestes et ses paroles, la blessure dont son cœur est atteint. Ses yeux ardents et ses soupirs enflammés montrent son âme consumée de désir. Tantôt son visage pâlit ; tantôt il se colore d’une vive rougeur ; enfin elle se hasarde à prendre un baiser. » Ma sœur s’était bien aperçue que la dame s’était trompée à son endroit. Ne pouvant lui venir en aide, en cette circons- tance, elle se trouvait dans un grand embarras. Il vaut mieux, pensa-t-elle, la détromper de sa fausse croyance, et me faire connaître pour une femme gentille, que de me laisser passer pour un homme ridicule. » Et elle disait vrai ; car c’eût été vraiment une infamie de la part d’un homme, de rester comme un marbre devant une si belle dame, pleine de grâces et d’agaceries, et de se borner à la payer de paroles, en tenant l’aile basse comme un coucou. De son air le plus aimable, ma sœur lui explique comme quoi elle est une damoiselle ; » Qu’elle cherche à acquérir la gloire des armes, comme ja- dis Hippolyte et Camille. Elle lui dit qu’elle était née en Afrique, sur le bord de la mer, dans la cité d’Arzille 86, et que, dès sa plus 86 C’est la Zilia de Pline ; aujourd’hui Arzilla, dans le Maroc. – 538 –