taureau. Mais mon désir est plus extravagant encore qu’aucun de ceux-là. » ”Dans les cas que je viens de citer, la femelle prit toujours un mâle pour objet de ses désirs ; elle pouvait espérer les satis- faire, et, comme je l’ai entendu dire, elle y réussit en effet. Pasi- phaë entra dans une vache de bois ; les autres arrivèrent à leur but par des moyens variés. Mais quand bien même Dédale me prêterait son ingénieux concours, il ne pourrait délier ce nœud- ci fait par la nature, cette maîtresse souveraine et trop pré- voyante.” » Ainsi se plaint, se consume, gémit la belle dame, sans pouvoir apaiser son ennui. Tantôt elle se frappe le visage, tantôt elle s’arrache les cheveux, cherchant à se venger d’elle-même. Ma sœur, toute contristée d’une telle douleur, en pleure de pitié. Elle s’efforce de la détourner de son fol et vain désir ; mais elle ne réussit pas et ses paroles sont vaines. » Fleur-d’Épine, qui réclame un secours et non des conso- lations, se lamente et se plaint de plus en plus. Déjà le jour ap- prochait de sa fin, et le soleil rougissait tout l’occident. Il était l’heure de chercher un abri, si l’on ne voulait point passer la nuit dans le bois. La dame invita Bradamante à venir avec elle dans sa demeure qui était peu éloignée de là. » Ma sœur ne sut pas lui refuser cette faveur, et elles vin- rent toutes les deux dans ce lieu même où la populace scélérate et félonne m’aurait jeté au feu, si tu n’étais arrivé. Dès qu’elles furent rentrées dans le palais, la belle Fleur-d’Épine combla ma sœur de caresses, et lui ayant donné des vêtements de femme, la fit reconnaître à chacun pour une dame, » Afin que personne, arguant de son aspect viril, ne pût en prendre prétexte pour la blâmer. Elle espérait aussi que, les vê- lements d’homme portés par Bradamante ayant causé son mal, – 540 –