tarder davantage. Peut-être trouvera-t-il sur son chemin quel- que message fidèle. Sans plus de retard, il saute hors du lit, et se fait apporter du papier, de l’encre, des plumes et de la lumière. Les camériers discrets et prévenants donnent à Roger ce qu’il demande, et il commence sa lettre. Les premières lignes sont consacrées aux salutations d’usage. Puis il raconte les avis qu’il a reçus au sujet de son roi qui réclame son aide. Il ajoute que s’il tarde à lui porter secours, Agramant périra ou tombera aux mains de ses ennemis. Il poursuit en disant qu’en cette circonstance et en pré- sence d’un appel si pressant, elle verra elle-même quel blâme énorme il encourrait, s’il refusait l’aide qu’on lui demande ; que devant être son mari, il devait se garder de toute tache, car il ne fallait pas qu’elle, si pure en tout, fût souillée par la moindre faute. Si jamais il s’est efforcé d’acquérir, par ses œuvres, un nom illustre, et si, après l’avoir gagné, il en est fier, il doit chercher à le conserver intact. C’est ce qu’il fait en ce moment. Il est avare de la pureté de ce nom, puisqu’il doit le partager avec elle. Elle sera sa femme, et leurs deux corps ne devront avoir qu’une âme. Aussi, ce qu’il lui avait déjà dit de vive voix, il le lui redisait encore par cette lettre : lorsque, l’heure sera venue où il sera dégagé de sa foi envers son roi, s’il n’est pas mort auparavant, il se fera chrétien de fait comme il l’est déjà d’intention. Puis il ira la demander pour femme à son père, à Renaud et à ses autres parents. « Je désire – ajoutait-il – qu’il vous agrée que j’aille faire lever le siège autour de mon seigneur, afin que la foule igno- rante se taise et n’ait pas le droit de dire : Pendant qu’Agramant fut puissant, Roger ne l’abandonna ni jour ni nuit ; maintenant – 550 –