reine42. Brunel chemine à peu de milles devant nous. L’anneau est doué d’une vertu telle, que celui qui l’a au doigt possède un remède contre le mal des enchantements. Brunel en sait autant, en fait de ruses et de fourberies, que celui qui détient Roger en sait en fait d’enchantements. » Ce Brunel, si adroit et si rusé, comme je te dis, est envoyé par son roi afin que, grâce à son génie et avec l’aide de cet an- neau dans de tels cas éprouvé, il tire Roger de ce château où il est détenu. Il s’est vanté de réussir, et a promis à son seigneur de lui ramener Roger, qui lui tient plus que tout autre à cœur. » Mais pour que ton Roger, à toi seule et non au roi Agra- mant, ait l’obligation d’avoir été délivré de sa prison enchantée, je t’enseignerai le moyen dont tu dois te servir. Tu t’en iras pen- dant trois jours le long des sables de la mer qui va bientôt se montrer à ta vue. Le troisième jour, dans la même auberge que toi, arrivera celui qui a l’anneau avec lui. » Sa taille, afin que tu le reconnaisses, n’atteint pas six palmes. Il a la tête crépue, les cheveux noirs et la peau brune. Sa figure est pâle et plus barbue qu’elle ne devrait. Il a les yeux en- flés, le regard louche, le nez écrasé et les sourcils hérissés. Son vêtement, pour que je le dépeigne entièrement, est étroit et court, et ressemble à celui d’un courrier. » Tu auras sujet de lui parler de ces enchantements étran- ges. Montre-lui ton désir – et tu l’auras en effet – d’en venir aux mains avec le magicien ; mais ne lui laisse pas voir qu’on t’a dit que son anneau rend les enchantements inutiles. Il t’offrira de te montrer le chemin jusqu’au château, et de te tenir compagnie. 42 Voir Boïardo, chant V du livre II, et Berni, chant XXXIV, stances 30 et suivantes. – 67 –