d’un mois aujourd’hui près de finir, elle ne trouve pas un cham- pion qui convainque de mensonge l’inique accusateur. » La dure loi d’Écosse, inhumaine et sévère, veut que toute dame, de quelque condition qu’elle soit, qui a des relations avec un homme sans être sa femme, et qui en est accusée, reçoive la mort. Elle ne peut échapper au supplice que s’il se présente pour elle un guerrier courageux qui prenne sa défense, et soutienne qu’elle est innocente et ne mérite pas de mourir. » Le roi, tremblant pour la belle Ginevra, – c’est ainsi que se nomme sa fille, – a fait publier par les cités et les châteaux que celui qui prendra sa défense et fera tomber l’indigne calom- nie, pourvu qu’il soit issu de famille noble, l’aura pour femme, avec un apanage digne de servir de dot à une telle dame. » Mais si, dans un mois, personne ne se présente pour cela, ou si celui qui se présentera n’est pas vainqueur, elle sera mise à mort. Il te convient mieux de tenter une semblable entreprise que d’aller par les bois, errant de cette façon. Outre l’honneur et la renommée qui peuvent en advenir et qui s’attacheront éter- nellement à ton nom, tu peux acquérir la fleur des belles dames qui se voient de l’Inde aux colonnes atlantiques. » Tu posséderas enfin la richesse, un rang qui te fera pour toujours une vie heureuse, et les faveurs du roi auquel tu auras rendu l’honneur qu’il a quasi perdu. Et puis, n’es-tu pas obligé, par chevalerie, à venger d’une telle perfidie celle qui, d’une commune voix, est un modèle de pudeur et de vertu ? » Renaud resta un instant pensif, et puis il répondit : « Il faut donc qu’une damoiselle meure, parce qu’elle aura laissé son amant satisfaire son désir suprême entre ses bras amoureux ? Maudit soit qui a établi une telle loi, et maudit qui peut la subir ! Bien plus justement doit mourir la cruelle qui refuse la vie à son fidèle amant. – 81 –