Enflammé d'amour, il chevauche à bride abattue, toujours en direction de Paris.
Et sa soif est si intense que même un cheval de guerre ou le vent lui sembleraient trop lents.

Il ne s'arrête guère la nuit durant sa poursuite, tant il est impatient de faire face au seigneur d'Anglante, et tant il a accordé de crédit aux paroles trompeuses de l'envoyé du sorcier rusé. Il ne cesse de chevaucher du matin au soir, jusqu'à ce qu'il aperçoive la ville où le roi Charles, vaincu et malmené, s'était réfugié avec les vestiges de son armée.

Et parce qu'il s'attend à un combat et un assaut du roi d'Afrique, il est très soucieux de rassembler des braves et de constituer des réserves, de creuser des fossés et de réparer les murailles. Tout ce qu'il croit utile à la défense, il se le procure sans plus attendre. Il envisage d'envoyer un message en Angleterre pour y recruter des troupes afin de constituer un nouveau camp.

Car il entend prendre le champ à nouveau et se risquer une fois de plus au gré des armes. Il envoie rapidement Renaud en Bretagne, une Bretagne qui, par la suite, fut appelée Angleterre. Le paladin se montre très réticent à cette mission, non qu'il déteste ce pays, mais parce que Charles veut qu'il parte immédiatement et ne lui laisse pas un jour de repos.

Jamais Renaud n'accomplit une tâche avec aussi peu d'enthousiasme, car cela le détournait de la recherche du visage radieux qui, du plus profond de sa poitrine, lui avait ravi le coeur. Néanmoins, pour obéir à Charles, il prit la route immédiatement et, en quelques heures, il arriva à Calais. À peine arrivé, il embarqua le jour même.

Malgré l'avis de tous les pilotes, en raison de son impatience de revenir, il prit la mer agitée et furieuse, qui semblait même menacer d'une grande tempête. Le vent se révolta de se voir ainsi défié par cet orgueilleux ; une effrayante
- 41 -