La distance qu'on pourrait couvrir en deux lancers de pierre à la main. Arrivés au pied de l'imposant rocher, chacun des deux hommes voulait entamer le combat en premier. Mais par un caprice du sort, ou peut-être parce que Roger se montrait moins impatient, c'est Gradasse qui ouvrit les hostilités. Le Sérican porta alors son cor à ses lèvres. La sonorité en emplit le rocher et résonna jusqu'au sommet de la forteresse. Et voilà que surgit depuis la porte, un chevalier armé, monté sur un destrier ailé. Il commença son ascension graduellement, à la manière de la grue voyageuse qui effleure d'abord la terre, avant de prendre de l'altitude, une ou deux brassées, et une fois ses ailes entièrement déployées, d'afficher sa vélocité. De la même façon, le nécromancien bat des ailes pour s'élever, atteignant une hauteur où même l’aigle peine à parvenir. Estimant être suffisamment haut dans le ciel, il redirige son destrier, qui replie ses ailes et descend sur terre en ligne droite, tout comme le faucon bien dressé fond du ciel à la vue du canard ou de la colombe qui prend son envol. Le chevalier, lance en avant, fend l'air et arrive dans un assourdissant vacarme. Gradasse n'a qu'à peine le temps de percevoir sa descente, qu'il le sent sur son dos et est atteint. Sur Gradasse, le magicien brise sa lance. Gradasse, lui, frappe le vent et l'air insaisissable. Pendant ce temps, le chevalier volant poursuit le battement de ses ailes et se distance. Le choc puissant fait pencher l'arrière de l'insolente monture sur le pré verdoyant. Gradasse avait une jument, la plus belle et la plus vaillante qui ait jamais porté une selle. Le chevalier volant remonte jusqu'aux étoiles. De là, il fait volte-face et revient en bas à toute vitesse. Il frappe Roger qui ne s'y attend pas, Roger qui était tout concentré sur Gradasse. Sous le rude coup, Roger fléchit, et son destrier recule de plusieurs pas.