cun ne court avec plus d’empressement que ces deux guerriers à la rencontre de l’horrible monstre. Au bas de l’un est écrit le nom de François de Pescaire, l’invincible ; au bas de l’autre on lit : Alphonse du Guast. Mais comment ai-je oublié Consalve Ferrante, l’honneur de l’Espagne, tenu en si grande estime, et dont Maugis fit un tel éloge que peu d’entre ces héros auraient pu lui être comparés ? On voyait Guillaume de Montferrat, parmi ceux qui mettaient la bête à mort. Cependant ils étaient peu nombreux, en comparai- son de tous ceux qu’elle avait tués ou blessés. C’est ainsi qu’en honnêtes passe-temps et en joyeuses cau- series, après le repas, ils passaient les heures brûlantes du jour, couchés sur de fins tapis, sous les arbres dont la rive était ornée. Maugis et Vivian, afin de protéger le repos de leurs compa- gnons, veillaient tout autour sous les armes. Soudain ils virent une dame, seule, accourir vers eux en toute hâte. C’était cette Hippalque à qui Frontin, le bon destrier, avait été ravi par Rodomont. Elle avait, pendant tout le jour précé- dent, suivi le ravisseur, tantôt le suppliant, tantôt l’accablant d’injures. Mais, n’obtenant aucun résultat, elle avait rebroussé chemin pour aller retrouver Roger dans Aigremont. En route, elle avait appris, je ne sais comment, qu’elle le trouverait en cet endroit avec Richardet. Et comme elle connaissait bien le lieu, y étant allée d’autres fois, elle s’en vint droit à la fontaine. C’est ainsi qu’elle le rejoi- gnit, comme je viens de vous le dire. Mais, en bonne et rusée messagère, qui sait encore mieux s’acquitter de sa mission qu’on ne lui a dit de le faire, elle fit semblant de ne pas connaître Ro- ger, en le voyant avec le frère de Bradamante. Elle se dirigea vers Richardet, comme si c’était pour lui qu’elle fût venue, et celui-ci, dès qu’il l’eut reconnue, vint à sa – 15 –