les chevaliers non pas seulement émerveillés, mais stupéfaits de sa vaillance. Quand ils furent à une certaine distance, Hippalque lui ra- conta qu’elle était envoyée vers lui par celle qui portait son image gravée au plus profond du cœur. Et, sans plus feindre, elle lui dit tout ce que sa maîtresse l’avait chargée de dire, ajou- tant que si elle avait d’abord parlé d’une autre façon, c’était à cause de la présence de Richardet. Elle dit que celui qui lui avait pris le destrier avait ajouté d’un air plein d’orgueil : « Puisque je sais que le cheval est à Ro- ger, je le prends encore plus volontiers justement à cause de cela. S’il a envie de le ravoir, fais-lui savoir – car je ne tiens pas à le lui cacher – que je suis ce Rodomont, dont la vaillance pro- jette son éclat sur le monde entier. » Roger écoute, et, sur son visage, il montre de quelle indi- gnation son cœur est embrasé. Frontin lui est cher ; de plus, il lui est envoyé par Bradamante, et voilà qu’on le lui enlève avec des paroles de mépris ! Il voit quel déshonneur l’atteindra s’il ne s’empresse de reprendre son cheval à Rodomont et d’en tirer une éclatante vengeance. La dame conduit Roger sans s’arrêter, désireuse de le met- tre face à face avec le païen. Elle arrive à un endroit où la route se divise en deux branches. L’une va vers la plaine, et l’autre sur la montagne. Toutes deux conduisent à la vallée où elle a laissé Rodomont. Le chemin qui prend par la montagne est rude, mais plus court que celui de la plaine ; celui-ci est beaucoup plus long, mais plus facile. Le désir qui pousse Hippalque de ravoir Frontin et de ven- ger l’offense qu’on lui a faite lui fait choisir le sentier de la mon- tagne, qui doit abréger de beaucoup leur voyage. Pendant ce temps, le roi d’Alger chevauche par l’autre sentier, en compa- – 17 –