gnie du Tartare et des autres chevaliers dont j’ai parlé plus haut. Comme il suit la route plus facile qui traverse la plaine, il ne peut se rencontrer avec Roger. Ils ont différé leurs querelles pour porter secours à Agra- mant. Cela, vous le savez déjà ; Doralice, cause de tous leurs débats, est avec eux. Écoutez maintenant la suite de l’histoire. La route qu’ils suivent conduit droit à la fontaine où Aldigier, Marphise, Richardet, Maugis et Vivian se livrent aux douceurs du repos. Marphise, cédant aux prières de ses compagnons, avait re- vêtu des vêtements de femme pris parmi ceux que le traître de Mayence croyait envoyer à Lanfuse. Bien qu’elle se montrât ra- rement sans son haubert et sans ses autres bonnes armes, elle consentit à les retirer ce jour-là, et, sur leurs prières, elle se lais- sa voir à eux sous des habits de dame. Aussitôt que le Tartare voit Marphise, il conçoit l’espérance de la conquérir, et il lui vient à la pensée de la donner à Rodo- mont, en échange de Doralice ; comme si l’amour pouvait s’accommoder de pareilles façons d’agir ! comme si un amant pouvait vendre ou changer sa dame, et se consoler de sa perte en en prenant une autre ! Donc, pour le pourvoir d’une donzelle en remplacement de celle qu’il lui a enlevée, il conçoit le projet de lui donner Mar- phise, laquelle lui semble charmante et belle, et digne de deve- nir la compagne de tout chevalier. Il pense qu’elle lui deviendra tout de suite aussi chère que l’autre. C’est pourquoi, il provoque au combat tous les chevaliers qu’il voit auprès d’elle. Maugis et Vivian, qui étaient restés armés pour veiller à la sûreté du reste de la troupe, s’élancent du lieu où ils se trou- vaient, tous deux prêts au combat et croyant avoir affaire à deux agresseurs. Mais l’Africain, qui n’est pas venu pour cela, ne fait – 18 –